Parlez-en à Raynald Gosselin, propriétaire d’un véhicule taxi qui arpente le secteur de Sainte-Thérèse depuis une douzaine d’années. Même si, comme il l’affirme, les chauffeurs Uber sont encore peu nombreux dans la région, il sait pertinemment qu’il se fait «voler des clients».
«Ça paraît dans mes poches!, dit-il. Les soirs où nous étions occupés par le passé commencent à être plus tranquilles. Si le gouvernement laisse aller, c’est certain que ça va venir chercher mes profits.»
M. Gosselin s’appuie sur les nombreuses sommes d’argent qu’il doit débourser chaque année pour user de son droit de s’insurger contre les chauffeurs Uber qui, insiste-t-il, «oeuvrent dans l’illégalité».
«S’ils veulent opérer, qu’ils payent 1000 $ de plaques comme on paye et qu’ils fassent inspecter leur véhicule. Mais à 1000 $ de plaques par année, je ne suis pas certain que les gars qui font du Uber vont continuer.»
Même son de cloche du côté de cette Eustachoise, propriétaire d’un taxi depuis le 31 décembre 2014. Sous le couvert de l’anonymat, elle affirme avoir payé 230 000 $ pour obtenir son permis de taxi. Aujourd’hui, elle craint pour son gagne-pain.
«J’ai mis toutes mes économies là-dedans et je dois travailler de 12 à 15 heures par jour pour survivre. On va finir par tout perdre si Québec ne fait rien !», se désole-t-elle.
Travail au noir
Questionnés à ce sujet, autant le président de Taxi 7000 de Sainte-Thérèse, Stéphane Mousseau, que celui de Deluxe Taxi de Saint-Eustache, Gilles Lacombe, ont dénoncé l’inaction du gouvernement Couillard.
«Les chauffeurs Uber ne payent pas de taxes, pas de permis, pas d’assurances et ils ne doivent même pas faire inspecter leur véhicule. En plus, ils choisissent leurs appels. C’est sûr qu’ils peuvent charger moins cher, mais c’est du travail au noir !», a ragé M. Lacombe avant d’ajouter qu’il serait prêt à partager la route avec Uber advenant le cas où ce service serait légalisé.
Quant à Stéphane Mousseau, impliqué au sein du Comité provincial de concertation et de développement de l’industrie du taxi (CPCDIT), il fait actuellement des démarches auprès de Contrôle routier du Québec, dont la mission est d’assurer la surveillance et le contrôle du transport routier des personnes, afin que plus d’agents patrouillent la région à la recherche de conducteurs Uber fautifs.
«Pour les chauffeurs d’Uber, c’est souvent un à-côté, c’est à dire qu’ils ont un emploi de jour et font ça le soir pour arrondir leurs fins de mois alors que nous sommes d’honnêtes citoyens !»
M. Mousseau sera heureux d’apprendre que ses démarches ont porté fruits car pas plus tard que la semaine dernière, les agents de Contrôle routier Québec ont appréhendé quatre chauffeurs d’Uber à Saint-Eustache.
De nombreux appuis
Alors que la commission parlementaire sur le transport rémunéré de personnes par automobile s’amorçait, jeudi, à l’Assemblée nationale, au moment d’écrire ces lignes, nous apprenions que le député de Québec solidaire, Amir Khadir avait porté plainte contre Uber auprès de la Sureté du Québec, qualifiant de fraude la façon d’agir de la compagnie.
Plus près de chez nous, Claude Surprenant, député de Groulx de la Coalition Avenir Québec, estimait qu’il était grand temps de mettre fin au Far-West dans l’industrie du taxi et demandait au gouvernement de rapidement adopter un décret dans ce dossier.