En point de presse dans les locaux de la CMM, vendredi après-midi, la mairesse de Blainville, Liza Poulin, et le directeur général de la CMM, Massimo Iezzoni, ont fait le point sur cette rencontre, survenue au lendemain d’une demande de rencontre réitérée auprès du premier ministre François Legault. Une rencontre qui ne semble pas avoir fait bouger d’un iota la volonté ministérielle d’aller de l’avant avec l’adoption du PL93.
Lors de leur rencontre matinale avec les ministres Blanchette Vézina et Charette, Mme Poulin et M. Iezzoni, ont néanmoins insisté sur l’importance de prendre le temps de bien évaluer l’option présentée, laquelle constitue selon eux une véritable solution pour dénouer la situation avec l’entreprise Stablex.
Solutions possibles
Avant d’en présenter les détails aux médias, Mme Poulin a tenu à dérouler les pages du mémoire déposé lors des consultations particulières devant la commission auxquelles elle a pris part, mardi matin. Elle a notamment effectué un petit rappel historique, soit le début des activités de Stablex en 1981, la construction résidentielle du projet du Boisé du Parc équestre en 1989, puis le décret de 1996 qui autorisait alors un échange de terrains entre Blainville et Québec pour l’aménagement de la cellule 6 et l’établissement d’une zone tampon de 300 mètres avec les résidences.
« Cette solution inédite comprend plusieurs éléments, incluant la protection d’une partie appréciable du territoire et la possibilité, pour Stablex, de poursuivre ses opérations durant 24 ans, en sus de la capacité résiduelle dont elle dispose », laisse entendre la mairesse de Blainville et la direction de la CMM.
La Ville de Blainville et la CMM proposent à Québec d’inciter Stablex à poursuivre ses activités sur la cellule 6, tel que prévu par le gouvernement du Québec dans son décret de 1996. La solution prévoit aussi de retirer complètement l’argile excédentaire qui encombre le site pour la répartir sur les anciennes cellules environnantes. « Il s’agit d’une proposition provenant de l’entreprise elle-même et qui engendre un très faible coût », fait remarquer la CMM.
Dans leur plan commun, on propose d’y aller avec un amendement réglementaire au règlement de contrôle intérimaire. La CMM est prête à retirer 7,2 hectares de milieux humides protégés par son règlement de contrôle intérimaire 2022-96 (RCI), lesquels sont situés sur le site de la cellule no 6 initialement projetée, afin que l’entreprise puisse y poursuivre ses opérations durant 24 ans. En contrepartie, la CMM protégerait 123 hectares de milieux naturels supplémentaires, ce qui permet d’éviter la fragmentation de l’écosystème et de consolider l’intégrité de la tourbière de Blainville.
« On est prêts à libérer ce sept hectares qui est sous le RCI de la CMM, sur un terrain qui est déjà perturbé par l’entreprise, ce qui permettrait à l’entreprise de pouvoir exploiter sur l’ensemble du terrain allant jusqu’à 24 ans. Ce qui est établi dans les différentes informations qu’on a reçues de l’entreprise Stablex, c’est que ce terrain-là pourrait être exploité pendant 24 ans », affirme Mme Poulin.
Le temps presse
Or, le temps presse. Dans son désir d’aménager une nouvelle cellule dans la tourbière, Stablex veut procéder à l’abattage des arbres d’ici le 15 avril. Le Règlement sur les oiseaux migrateurs du gouvernement fédéral interdit en effet de troubler les écosystèmes après le 15 avril, pendant la période de nidification.
Mme Poulin et M. Iezzoni estiment qu’à peine une semaine suffirait pour mettre en œuvre leur solution, « répondant ainsi à l’impératif d’urgence invoqué par l’entreprise et par le gouvernement du Québec », disent-ils.
« Cette proposition s’inscrit pleinement dans le cadre de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, tout en respectant le principe de l’autonomie municipale. Elle répond point par point à tous les objectifs énoncés dans le projet de loi 93, en plus d’être conforme à la recommandation énoncée par le BAPE en 2023 », précise le directeur général de la CMM, Massimo Iezzoni.
Consensus
La mairesse de Blainville ajoute que cette proposition fait consensus parmi l’ensemble des parties prenantes. « Tout le milieu municipal, le monde agricole, de même que des dizaines de milliers de citoyennes et de citoyens se sont exprimés contre le projet du gouvernement d’enfouir des résidus de matières dangereuses au cœur des tourbières. Notre proposition concilie les intérêts de la population et ceux de l’entreprise, sans aucun coût pour les contribuables. Il faut suspendre l’adoption du projet de loi 93 et examiner cette solution dès maintenant », plaide la mairesse Liza Poulin.
La CMM n’écarte pas la possibilité de soumettre à la Cour supérieure du Québec une demande de sursis d’application de la loi advenant son adoption. « On a déjà communiqué auprès du procureur général du Québec notre intention de contester le projet de loi. On est prêts. Dès que le projet de loi sera sanctionné, on ira faire valoir nos droits », soutient M. Iezzoni.
Amender le RCI
Mais d’ici là, certaines étapes devront être franchies. Si la Ville de Blainville et la CMM adoptent l’amendement du RCI, celui-ci sera soumis ensuite au ministère des Affaires municipales et de l’Habitation en vue de son adoption.
« Si nous transmettons cette semaine le règlement au gouvernement, le gouvernement a 60 jours pour y répondre. Suite à la présentation et discussion qu’on a faite, s’ils peuvent réduire le délai, on n’aura peut-être pas besoin d’un projet de loi à adopter. Et les discussions qu’on a eues ce matin, c’est d’évaluer cette possibilité-là. C’est un choix difficile qu’on fait de soustraire un terrain, mais pour les fins d’éviter un bris pour la continuité de l’entreprise, on le fait. Et à ce moment-là, l’entreprise peut continuer jusqu’à 24 ans de plus sur ce site-là. En même temps, parce qu’on veut concilier développement économique et développement environnemental, on fait un gain de 120 hectares autour de la tourbière. Si on peut le faire dans les délais avant l’adoption du projet de loi, on constate que le projet de loi n’est plus nécessaire et que la compagnie peut maintenant continuer sur le site où elle opère et mettre la cellule 6 là. C’est ça, notre proposition », a précisé Mme Poulin.
Quant à l’éventualité d’une discussion directe entre la Ville de Blainville et Stablex, tel que lui a suggéré le ministre Benoit Charette, Mme Poulin estime que ce n’est pas de son ressort. « C’est une compétence qui appartient au gouvernement du Québec. C’est lui qui a la responsabilité d’utiliser cette nouvelle variable d’amendement au niveau du règlement de contrôle intérimaire et de jouer son rôle de médiateur entre les parties prenantes qu’il jugera nécessaires à avoir autour de la table de faire son travail à cet effet-là. »
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