Découragé par les exigences démesurées de certains employés, exaspéré par le manque de respect de certains clients et médusé par le je-m’en-foutisme de certains fournisseurs pour le manque grandissant d’aliments, le propriétaire du restaurant La Verdura de Blainville mets la clef dans la porte.
Alexandre B. Beaudin a écrit un virulent message sur la page Facebook du restaurant qui ne laisse personne indifférent. Les mots sont cinglants, les phrases remplies de stupéfaction et le tout illustre sa triste réalité, comme celle de bien des employeurs.
Les employés sont les plus durement sermonnés. « Les employés sont tous devenus indispensables, même les incompétents. À notre réouverture après les mesures sanitaires, j’ai gardé un employé qui était médiocre, mais c’était le prix à payer pour ne pas refuser de réservations », déplore-t-il avec virulence.
M. Beaudin en a gros sur le cœur avec des anciens employés. « J’ai perdu la moitié de mes serveurs parce que je les forçais à revenir au boulot au lieu de rester à ne rien faire sur la PCU ».
Ce dernier mentionne avoir été obligé de scinder sa salle à manger en deux à la réouverture après la pandémie, de 120 à 60 places, le nombre de serveurs étant de nouveau insuffisant pour offrir le service à une centaine de clients le week-end et la moitié moins en semaine.
Alexandre Beaudin dit être à la merci de ses employés. Il leur reproche de pratiquement décider des heures d’ouverture du commerce. Encore là, il a dû revoir ses heures d’ouverture, faute de personnel. « Tu ne peux refuser un congé demandé à la dernière minute, de peur de le perdre. Les nouveaux candidats sont plutôt rares ».
Les fournisseurs ne sont pas en reste, au contraire. « Certains aliments sont soudainement indisponibles, pour diverses raisons. Les fournisseurs, eux, décident donc de mon menu et ne sont même plus un brin mal à l’aise devant leur incompétence récurrente, sans parler des hausses répétitives de prix ».
Des clients qui tirent du jus
Heureux d’avoir reçu à souper pendant des années des gens fidèles et respectueux qui feraient l’envie de plusieurs restaurateurs, Alexandre avait aussi de la colère envers « d’autres clients moins agréables. Ces mêmes personnes font la file chez Costco comme des moutons dociles, mais n’ont aucun scrupule à plaider énergiquement tous leurs arguments et menaces pour obtenir une banquette, une table à une heure indisponible ou tout autre exigence, comme s’ils étaient de prestigieux invités d’un restaurant cinq diamants ».
Pour lui, il existe clairement un décalage entre la perception de son entreprise par les clients et son offre de service modeste et sans prétention. « Certaines revendications sont disqualifiées d’emblée quand le prix moyen d’un plat est de 25$. Ces clients, bien que minoritaires, sont assez nombreux pour faire partie des causes d’un ras-le-bol menant à cette fermeture annoncée. J’en ai soupé des snobes ».
Alexandre Beaudin est visiblement désillusionné par le métier qu’il aimait tant. « J’ai toujours été serveur même pendant mes études universitaires. Depuis huit années et demie, je suis propriétaire. Être restaurateur venait avec de grandes libertés, un espace riche de créativité et une occasion de côtoyer des gens incroyables. Hélas, il s’agit plus que jamais d’une vocation peu valorisée, pleine de contraintes. »
Le dernier service du Verdura aura lieu le samedi 18 juin, de 16h à 22h. Le dimanche 19 juin sera ouvert que pour les commandes à emporter et les livraisons seulement, jusqu’à épuisement des inventaires.
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