Au Québec, on estime à 1,3 million le nombre d’adultes de 16 ans et plus qui ont de grandes difficultés avec la lecture et l’écriture. Lorsqu’ils ont le courage de se présenter dans l’un des 76 organismes du Québec dédiés à l’alphabétisation, ils y apprennent non seulement à lire et à écrire, mais sortent du coup de leur isolement, une problématique encore trop fréquente chez les personnes analphabètes.
«Ici, c’est un milieu de vie pour nos participants. Il a fallu être très créatif pour continuer d’offrir nos services», de dire Mme Gaudreault qui, en marge de cette Journée de l’alphabétisation, a demandé aux participants de dire ce qui les rendait fiers.
«Certains étaient heureux de pouvoir maintenant accompagner leurs enfants dans leurs devoirs. D’autres disaient à quel point le fait de fréquenter la Maison des mots les avait aidés à se débrouiller au quotidien. Leur estime de soi est à son plus haut niveau !»
Le fossé numérique
S’il y a un aspect qu’il faut adresser, selon Ilham Gaudreault, c’est bien le fossé numérique qui existe pour les analphabètes. Bien que les activités à distance ne soient pas ce que les organismes privilégient, dans certains cas et pour certains adultes, elles s’avèrent incontournables. Mais de nombreux organismes et personnes participantes ont besoin d’un appui financier pour s’équiper en conséquence. La pandémie est venue exacerber les inégalités d’accès au numérique.
«L’accès aux technologies de l’information et de la communication incluant Internet, ou le fait de savoir s’en servir, demeurent aujourd’hui des privilèges pour beaucoup de personnes peu alphabétisées ou en situation de pauvreté», indique Mme Gaudreault avant d’ajouter que la fracture numérique accentue donc l’exclusion sociale de ces personnes.
«Lorsque les informations au sujet de la pandémie ont commencé à circuler, nous-mêmes, alphabétisés, avions de la difficulté à nous y retrouver, imaginez les personnes analphabètes !»
Chacun et chacune devrait avoir accès à un ordinateur et à une connexion Internet à faible coût, insiste la coordonnatrice de la Maison de mots qui pourrait alors s’occuper de la formation nécessaire pour les utiliser.
«Que ce soit en personne ou par l’entremise des outils numériques, en ces temps de crise sanitaire et de distanciation, il est plus que jamais essentiel de ne laisser personne de côté!».
Manque à gagner
Évidemment, pour équiper la cinquantaine de personnes qui fréquentent la Maison des mots sur une base annuelle, on a besoin de sous, et c’est là où le bât blesse, déjà que la pandémie a eu pour effet de vider les coffres.
En moyenne, chaque organisme doit en effet assumer des coûts supplémentaires de près de 25 000 $ pour mettre en place les mesures sanitaires requises. C’est du moins ce que révèle un sondage réalisé récemment auprès des membres du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ). Cela est sans compter les pertes de revenus engendrées depuis le début de la pandémie. Le fardeau financier lié à la crise sanitaire s’ajoute donc aux quelque 10 millions de dollars de manque à gagner dont souffre annuellement le réseau des groupes populaires d’alphabétisation.
«Une personne sur cinq est analphabète au Québec. Les organismes ont besoin dès maintenant d’un soutien accru de la part de leur principal bailleur de fonds, le ministère de l’Éducation», a conclu Ilham Gaudreault.
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