«Il n’y a que des visages et des silhouettes de femmes dans mes tableaux» , pointe-t-elle tout d’abord, des visages dont les yeux sont toujours cachés, voilés, volontairement dissimulés. «Le regard, c’est ce qui parle le plus dans un visage» , exprime l’artiste qui, se faisant, affranchit le spectateur d’une vision imposée, dirigée, lui permet de se faire sa propre lecture de l’œuvre, de se laisser guider par son intuition et sa propre émotion.
Sensualité et force brute
Dans ces univers contrastés et peints à l’acrylique, il n’y a pas que les couleurs et les émotions qui s’opposent. Sur ses fonds généralement rouges teintés de noir, Anie Artsy élabore un langage cohérent qui s’élabore dans des enchevêtrements de lignes et de signes graphiques composant des structures abstraites, lesquelles pourraient se suffire à elles-mêmes, mais qui accueillent néanmoins ces personnages féminins (sauf une exception non genrée) dont nous vous parlions plus haut.
Ces femmes habitent l’espace ou le traversent en y tenant un rôle bien précis, en s’acquittant d’une sorte de mission, nous dit l’artiste. «Elles me représentent en même temps que toutes les femmes de la société. Sans dire qu’il s’agit d’une exposition féministe, je donne toute la place à la féminité dans mon art, la mienne et celle de toutes les femmes» , dit-elle.
«Je n’ai rien d’une mannequin, poursuit-elle, mais je suis super bien dans ma peau. Je veux que ça se transmette. Oui, nous, les femmes, avons le droit de peindre des choses sensuelles, mais aussi de peindre des choses énergiques, de représenter la force brute. C’est ce que je veux dire à travers mon exposition.»
Intensité et recueillement
Parlant d’énergie, lorsqu’elle peint, Anie Artsy dispose souvent trois chevalets autour d’elle et travaille sur autant de tableaux en même temps, passant de l’un à l’autre en attendant que ça sèche, parce qu’elle n’aime pas se tourner les pouces. «L’acrylique sèche vite. Je suis une personne qui n’a aucune patience, alors ce médium me ressemble» , indique l’artiste en ajoutant que ses séances de travail sont à son image, c’est-à-dire intenses. Elle s’installe alors sans idée préconçue, si ce n’est le choix d’une couleur puisqu’il faut s’assurer que chaque tableau parle le même langage. Pour le reste, ces jours où elle «n’adulte» pas (un verbe de son cru), elle investit son atelier, là où elle se permet de jouer comme une enfant, avec ses couleurs, avec sa personnalité. «C’est un luxe, un plaisir que la vie m’apporte» , souffle-t-elle.
En parcourant cette exposition, vous noterez par ailleurs des références à la mer, lAnie Artsy constellant ses tableaux d’éléments issus de l’onde, notamment ces méduses qu’elle fait intervenir ici et là. «Je suis un poisson, dit-elle, et la mer est un élément significatif pour moi. Sans tomber dans le cliché, je dirais que mes bleus à l’âme amènent le bleu sur la toile. C’est la couleur non pas de la tristesse, mais du recueillement.»
Anie Artsy peint depuis une vingtaine d’années, mais elle le fait sérieusement et à temps plein depuis cinq ans, c’est-à-dire depuis le jour où elle a décidé de quitter son métier d’horticultrice, une période charnière de sa vie qui a notamment donné ce tableau intitulé Force tranquille, qui lui a valu une médaille d’or lors d’une exposition-concours tenue à la galerie La Pigna, à Rome.
Ce tableau (et bien d’autres), vous pourrez le voir jusqu’au 26 novembre, à la Galerie Kokë située au 415, chemin de la Grande-Côte, à Rosemère.
MOTS-CLÉS
Rosemère
artiste peintre
Sainte-Eustache
Anie Artsy