Il convient de le souligner, il y avait foule dans cette salle, même les sièges dans les gradins étaient pleins. C’est que le nom de Boucar Diouf figure certainement parmi les humoristes les plus connus et appréciés du répertoire comique du Québec.
Et avec raison d’ailleurs. L’homme est espiègle et original tant dans son propos que dans la forme audacieuse avec laquelle il livre Homosapiens, qui est en réalité le titre du spectacle.
L’homosapien et les chimpanzés
C’est que ce biologiste et océanographe d’origine sénégalaise ayant pris racine dans la Belle Province et à Rimouski au départ pour y enseigner s’est laissé séduire par la poésie du conte qu’il agrémente d’un humour certain.
On devine aisément son intérêt pour l’homosapien dont il relate l’évolution tout au long du spectacle en nous faisant découvrir les différents groupes de chimpanzés, les Grands singes et les Bonobos.
En deux heures sans aucune intermission, Boucar raconte l’être humain en y présentant des parallèles avec ces deux groupes de singes.
Pour ceux qui l’ignorent, comme l’autrice de ces lignes, la race des Bonobos se distingue par une organisation sociale ayant recours aux relations sexuelles. La bonne entente et la résolution de conflits à l’intérieur de cette communauté matriarcale se règle à partir des rapports sexuels. À l’inverse, le Grand singe est un dominateur qui fonctionne à partir de rapports de force.
L’Homme a-t-il des ressemblances avec ces deux groupes de primates ? Eh bien, c’est la question à laquelle s’est intéressée le biologiste Boucar, mais c’est l’humoriste qu’il est devenu qui s’efforce de répondre à la question, d’établir de possibles liens.
Non, l’homme ne descend pas du singe, assure le biologiste. N’empêche que le fonctionnement social de ces deux groupes de primates éveille la curiosité.
De calembours et de réflexions
Évidemment, cette thématique n’est qu’un prétexte pour que Boucar nous livre ses pensées loufoques, tantôt spirituelles, tantôt philosophiques.
En trois étapes, Boucar nous fait part de ses réflexions qui sont d’une drôlerie incommensurable. L’humoriste use de calembours pour notre plus grand plaisir.
Ah, la culture québécoise !
Il réécrit ces petites expressions issues de la culture québécoise. Il en invente par la même occasion.
« Chasses le naturiste et il revient au bungalow. » « Il faut rendre à ces arbres, ce qui appartient à ces arbres. » « Les gens sont si obsédés par leur épilation que les morpions sont menacés d’extinction. »
Et il faut l’entendre énumérer tous les termes et expressions incluant le mot « Noir » utilisés quotidiennement : « travail au noir » – « noir comme le poêle » – « un œil au beurre noir » – « avoir les idées noires » – « jarret noir » – « humour noir » – « marché noir », etc. Bref, ce ne sont pas les références « noires » qui manquent à notre vocabulaire usuel, comme nous l’a bien fait réaliser l’humoriste.
Il se moque des Québécois au nez de tous les spectateurs québécois qui rient de bon cœur et en redemandent. C’est que Boucar n’hésite pas à rire de lui-même aussi, lorsqu’il nous rappelle son attachement à ses origines, à son Rimouski d’accueil…ainsi qu’à son bungalow.
Bref, un texte ne suffit pas à rendre hommage à l’homme de scène extraordinaire qu’est Boucar Diouf, tant ses réflexions et calembours sont riches de sens et de poésie, même teintés de légèreté.
MOTS-CLÉS
Odyscène
Théâtre Lionel-Groulx
Spectacles