J’avais 15 ans la première fois que j’ai joué du Paul Piché sur ma guitare et depuis, sa musique s’est inscrite dans mon parcours comme des traces dans la neige. Vingt-deux ans plus tard, je rencontre mon idole de jeunesse à l’occasion du 35e anniversaire de son album Sur le chemin des incendies.
Sorti en 1988 et ayant atteint le statut de platine en 1990, l’album inclut des titres à succès tels que Sur ma peau, J’appelle et Un château de sable. Préparant notre rencontre, je suis tombé sur une captation vidéo de Radio-Canada datant de 1990, un concert soulignant la fin de la tournée originale. Dès les premières minutes, Paul Piché, au sommet de sa deuxième jeunesse nous guide dans un parc en méditant sur le temps. « Ce qui est drôle avec le temps, c’est qu’on peut décider de le prendre… et alors il ralentit. Ou encore, il nous échappe ».
Trente-cinq ans après la fin de la tournée, je lui demande si, en rétrospective, il a su prendre le temps ou s’il lui a échappé.
« J’ai certainement pris le temps, mais des fois, je l’ai peut-être un peu trop pris, ce qui a fait que je l’ai échappé, dit-il amusé. Je vis ma vie comme ça, en prenant le temps. J’ai le luxe de faire ça, de pouvoir chanter encore aujourd’hui. C’est un grand privilège. Ça me permet de prendre mon temps. Le public m’a un peu fait comprendre que c’était la bonne chose à faire. »
“Je suis pas vite”
« Je suis pas vite, admet-il. Une chanson comme L’escalier, ça m’a pris trois ou quatre ans à composer ; même chose pour Heureux d’un printemps. J’ai pas fait ça en une journée, ça n’existe pas pour moi ça. Ça m’est arrivé seulement deux fois d’écrire une chanson d’un coup, c’était À côté de toi, et l’autre c’était Le Renard, le loup, sur mon premier disque. Je trainais à Québec à l’époque. Je me suis réveillé un matin et j’avais fait ce rêve où j’étais chez mes parents à La Minerve. C’est un rêve qui parlait de mes parents et de ma famille. Toutes mes autres chansons j’ai mis des années à les écrire. »
Quant à la renaissance de Sur le chemin des incendies sur scène, c’est une boucle qui se referme, un retour aux sources où l’album semble plutôt redonner vie à l’artiste plutôt que l’inverse.
« Je n’ai jamais fait un spectacle comme ça avant. On parle beaucoup de création, on parle beaucoup avec le public. J’avais peur de rester pris dans le passé avec ce genre de tournée, mais on partage une nouvelle chanson et au terme de cette tournée qui s’étire, parce qu’on aime ça, parce que le public en redemande, on ne sait pas quelle forme ça va prendre, mais il va y avoir du nouveau matériel. Peut-être un EP ! Or, on fête le passé. Oui, on crée au présent, mais aussi pour le futur. C’est pour ça qu’on aime ça et qu’on continue. D’ailleurs, la tournée devait se terminer le 1er mars initialement, mais on a décidé de continuer encore ce printemps ».
L’esprit véritable du ski de fond
Vers la fin de notre échange, il me parle d’un projet qui le passionne plus que tout en ce moment et qui, je réaliserai plus tard, témoigne puissamment de qui il est.
« Je suis en train de me faire une belle piste de ski de fond. J’aime beaucoup le ski de fond, mais souvent je trouve que les pistes sont un peu mal faites. Dans le sens qu’il y a des courbes en bas des descentes des fois. Ce n’est pas une bonne idée, s’esclaffe-t-il. C’est un stress inutile je trouve. L’esprit véritable du ski de fond c’est plus tranquille, il n’y a pas de piège. Alors je suis en train de faire une belle piste où se suivent les descentes et les remontées, tu sais, dans les montagnes comme doit se pratiquer le ski de fond. »
Rencontrer Paul Piché et discuter de ses passions et de son art a été un privilège. Il aborde sa musique comme le ski de fond, avec délicatesse et attention, sans obstacle inutile, parfois pendant des années ! C’est un parcours pensé pour le plaisir, et qui laissera des traces qui dureront bien au-delà de son passage.
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