Pour dire les choses autrement, un théâtre communautaire en est un qui appartient à la communauté, financé en partie par celle-ci, mais également perméable aux subventions, aux commandites et au mécénat. C’est aussi l’envers du théâtre professionnel.
L’exemple gatinois
«J’ai appris à jouer sur les planches, à l’école secondaire, mais aussi au théâtre communautaire», énonce Roc Lafortune (Les Boys, Les Pays d’en haut, Histoires de filles), un résidant de Rosemère qui a aussi vécu en Outaouais, où il existe justement un établissement appelé Le Théâtre de l’Île, créé en 1976 à Hull (devenue Gatineau) à titre de premier théâtre municipal au Québec. «À l’époque, on y présentait trois ou quatre productions communautaires par année, et un ou deux spectacles professionnels. Les choses ont évolué, mais on a gardé le modèle et ça fonctionne encore très bien», dit-il.
«Il pourrait y avoir des productions professionnelles, pour rentabiliser la chose, mais je voudrais que l’aspect communautaire domine. Il y a déjà suffisamment de salles professionnelles dans la région», exprime Roc Lafortune, qui se voit aux commandes du projet, à titre de directeur artistique.
Idéalement, on construirait une salle de 100 places entièrement vouée à la chose, mais ce théâtre communautaire pourrait aussi être aménagé dans un bâtiment existant. Des contacts ont d’ailleurs déjà été établis avec les élus d’une des villes de la MRC. Une porte s’entrouvre.
«Il y a beaucoup de retraités, dans la région. Il y a aussi des jeunes qui aspirent peut-être à devenir acteurs ou non. Des gens qui ont tout simplement envie de faire autre chose, qui réalisent soudainement un rêve, à 40, 50 ou 60 ans, parce qu’ils n’avaient pas osé le faire avant», énumère Roc Lafortune.
Des ateliers du soir
C’est dans ce terreau qu’il compte puiser ses effectifs. Des gens prêts à s’investir dans le jeu, dans l’apprentissage du jeu, dans une dynamique où, on se répète, le plaisir sera toujours privilégié. Actuellement, l’acteur donne des ateliers du soir pour le compte de la Ville de Rosemère, au centre communautaire Memorial de la Grande-Côte.
Une première session a été dispensée à l’automne et une autre vient de commencer, à l’intention de tous les résidants de la MRC ou d’ailleurs (on peut encore s’inscrire via le site Web de la Ville de Rosemère). On y travaille des scènes de théâtre, mais aussi de cinéma, des textes publicitaires, des contes pour enfants, on fait de l’impro, de la mémorisation visuelle, bref, on travaille tous les aspects du métier d’acteur, sans entrer dans la technique (voix, diction, projection, etc).
«Je n’appelle pas ça un atelier théâtre, ni un cours de théâtre, mais un atelier de jeu. Ce que j’essaie de partager avec les gens, c’est mon plaisir de jouer et non celui d’être un acteur», dit-il. La différence est là, poursuit Roc Lafortune, qui insiste sur l’importance de se laisser emporter par le jeu et d’y croire. «C’est la base du jeu d’acteur, tranche-t-il. C’est d’embarquer dans le jeu du personnage à tel point qu’on devient ce personnage.» Ça se fait dans l’abandon, à distance du jugement porté sur les autres et, surtout, sur soi-même. Il paraît qu’une fois qu’on a eu la piqûre, on est cuit.
Un horizon de cinq ans
Dans ses rêves les plus fous, Roc Lafortune se voit couper le ruban inaugurant le Théâtre au bord du Nord (un titre de travail, qui le demeurera puisque qu’on ne voudrait pas que la chose soit confondue avec le Petite Théâtre du Nord) dans cinq ans. Quatre ou cinq fois par année, on y présenterait des spectacles de très haut calibre, soutient Roc Lafortune, avec la même dynamique et la même qualité que les spectacles professionnels. On y offrirait une formation en jeu, mais aussi en mise en scène, en conception de décors et de costumes.
Pour le seul plaisir de la chose, insiste encore Roc Lafortune, qui mesure le succès de tout ce qu’il a entrepris à la même aune. L’idée est lancée.