C’est le cadeau que lui offrait l’établissement à l’occasion de son anniversaire, elle qui venait ainsi de glisser dans le camp des rares centenaires.
Née à Montréal en 1925, Mme Hotte y a passé sa vie avant de venir s’établir à Sainte-Thérèse en 2015 afin de se rapprocher de sa fille Carole, qui habite Laval, et de sa petite-fille Mélanie, qui réside à Mirabel. Celles-ci s’y amènent tous les samedis pour une partie de SkipBo, une activité privilégiée par la centenaire, tout comme le bingo hebdomadaire qu’elle ne manque jamais, remportant régulièrement l’un des prix.
Pour la petite anecdote, Mme Hotte-Houde a la main heureuse en matière de bingo ; elle a entièrement meublé son appartement grâce aux prix qu’elle a remportés. Et de beaux meubles avec ça.
« C’est une joueuse de bingo redoutable et depuis toujours, signale sa fille Carole Houde. Lorsqu’elle voyait quelque chose qu’elle voulait acheter, elle partait au bingo, le soir, et elle gagnait. » Sur ces paroles, Mme Hotte désigne fièrement son set de table de cuisine, d’une valeur de 1 000 $, qu’elle a pu se payer grâce à la cagnotte du bingo. C’est dire à quel point l’entrée gratuite au bingo étalée sur les deux prochaines années représentait un cadeau appréciable pour la centenaire.
« Ma mère n’a jamais eu de dettes », ajoute Carole Houde. Et pour cause. Tout au long de sa vie, Mme Hotte Houde s’est assurée de gagner sa vie et de prendre des décisions en toute indépendance, et ce malgré les pressions sociales de l’époque.
Divorcée après cinq ans
S’étant mariée à l’âge de 28 ans, elle a mis fin à son mariage cinq années plus tard, avec deux enfants sur les bras. « C’était un courailleux ; il couraillait les autres femmes. Il avait tous les défauts », lance Mme Pauline spontanément, hésitant visiblement à ajouter qu’il se montrait également violent envers elle. « Il m’a fait bien du trouble », se contentera-t-elle de formuler.
Bien qu’elle ait travaillé toute sa vie dans des magasins de vêtements, ses revenus ne lui assuraient pas de quoi faire vivre ses enfants, âgés alors d’un an et demi et de trois ans. Elle s’en est donc séparée pour les confier aux Sœurs Grises afin de leur garantir un toit sur la tête et une scolarité convenable.
C’est donc au sein d’un couvent de Beauharnois qu’ont grandi Carole et Daniel, les deux enfants de la centenaire, que celle-ci venait tout de même visiter. Les divorces n’étant pas dans les mœurs de l’époque, pas plus que les allocations familiales gouvernementales, Mme Hotte-Houde a donc dû se séparer de ses enfants, qui ne lui en tiennent pas rigueur, comprenant fort bien le dilemme embarrassant de leur mère. « À l’époque, des mères seules, ça n’existait pas », explique Carole.
Après avoir vécu avec leur grand-mère, ils sont retournés au foyer parental, elle avec sa mère Pauline, et Daniel, chez son père avant de reprendre le chemin du foyer maternel.
Une vie active
Lorsqu’on lui demande si elle s’est remariée, Mme Pauline affiche une mine de personne échaudée. Il y a bien eu un certain Ernest, mais pas question d’un remariage ni même d’une vie conjugale : « Oh mon Dieu non, je ne voulais rien savoir », lance-t-elle vivement.
Il est bien connu que les femmes de son époque n’avaient pas un large éventail de choix professionnels. Bien qu’elle soit satisfaite de son parcours de vie, elle aurait bien aimé apprendre le piano, elle qui aimait tant danser, confie-t-elle.
Mais lorsqu’on lui demande quel est son plus beau souvenir, son visage s’illumine et elle désigne ses enfants, sa famille. Sa petite-fille Mélanie, qui approche de la cinquantaine, se dit fort heureuse d’avoir sa grand-mère encore en vie, qu’elle ne manque pas de visiter tous les samedis.
« Ma grand-mère, c’est une femme de cœur, pleine de vie. Elle a passé sa vie à danser, à rire et à jouer aux cartes avec passion. Le samedi, lorsqu’elle me gardait, nous partagions un souper en amoureux, moi avec ma coupe de jus de raisin. Ce sont des souvenirs tendres et précieux que je garderai toujours », assure Mélanie Forest.

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