Elle était si près de la victoire, à deux points de son objectif, prendre sa revanche de 2019, mais une autre blessure à un genou, a tout basculé. Elle est repartie en pleurs, souffrante physiquement et moralement des Championnats du monde en Égypte. Gabriella Page de Blainville est une athlète olympique en escrime.
La sabreuse de 27 ans était en plein contrôle de ses moyens. Sa stratégie portait fruit. Son adversaire, la même qui l’a battue en 2019, était découragée, ne sachant plus comment stopper les attaques victorieuses de Page, visiblement trop forte cette journée-là. Elle menait 8-4, puis 13-9. Deux difficiles points et c’était mission accomplie.
Soudainement, le malheur est revenu s’acharner sur Page. Elle a alors chuté en tentant de bloquer une attaque de son opposante, l’Indienne Bhavani Devi Chadalavada Anandha Sundhararaman.
« Je me suis blessée à la jambe gauche en reculant pour éviter le sabre de mon adversaire. Un soigneur m’a examinée pendant quelques minutes, je ne ressentais pas de douleur ».
Elle se relève, sachant qu’il ne reste plus que deux petits points pour une victoire historique. Au moment de reprendre l’action, elle tombe au sol à nouveau.
« Je ne pouvais mettre de poids sur mon genou, il lâchait tout de suite. Il reste deux points, je vais passer à travers la douleur », se dit la jeune femme, comportement d’une vraie championne.
Malgré toute la volonté du monde et une détermination sans borne, Gabriella Page n’est plus elle-même, la souffrance est trop intense. Elle perd souvent l’équilibre et ne parviens plus à retrouver sa position de départ.
« Je ne pensais plus. J’avais trop mal ».
Son adversaire profite de la faiblesse de Page et remonte la pente. Le pointage est de 14-14, le point ultime s’en vient. Les deux tireuses attaquent, Page saute à cloche-pied. Elle tombe sur le tapis, épuisée. Son entraîneur lui vient en aide pour la relever et attendre le verdict de l’officiel, qui a eu recours à la reprise vidéo pour déterminer qui a marqué cette dernière touche. Défaite crève-cœur de Page, qui éclate en sanglots.
« Quand j’y repense, je ne sais même pas comment j’ai fait pour continuer le combat, sûrement l’adrénaline ».
Opération et réhabilitation
De retour au pays, Gabriella Page subira une opération au genou gauche, cette semaine. De six à neuf mois de réhabilitation seront nécessaires.
« J’espère que je serai remise sur pied pour le mois d’avril 2023 alors que débutera les qualifications pour les Jeux Olympiques de 2024 à Paris ».
Un scénario qui se répète. En 2016, elle n’avait pas été en mesure de se qualifier aux Jeux de Rio de Janeiro, au Brésil, en raison de graves blessures à ses deux genoux.
Celle qui a participé aux Jeux Olympiques de Tokyo en 2021, a débuté sur le tard l’escrime, à 14 ans. Les autres participantes ont tenu leur premier sabre plus vers les huit ans.
« Je fréquentais le camp de jour de Blainville, à une semaine de la fin, ma mère m’a demandée si je préférais m’inscrire à des cours d’escrime ou de théâtre. Je lui ai laissé choisir pour moi et son choix a été le meilleur ».
On ne dirait pas ça par contre en connaissant le résultat de sa première compétition provinciale, en 2008, chez les juniors. Sur trois escrimeuses, elle a terminé dernière.
Après un passage difficile du junior au senior, elle devient membre de l’équipe canadienne en 2011.
Depuis, elle ne cesse d’impressionner avec un intéressant palmarès de médailles sur la scène internationale : Médaille de bronze au sabre par équipe aux Championnats panaméricains de 2012 et 2013. Deux ans plus tard, une autre médaille de bronze en sabre individuel aux Jeux panaméricains de même qu’une troisième place au sabre par équipe aux Championnats panaméricains d’escrime de 2016.
En 2019, elle monte sur la deuxième marche du podium aux Championnats panaméricains, en sabre par équipe, et sur la troisième marche en sabre individuel avant de décrocher la médaille de bronze en sabre individuel et la médaille de bronze en sabre par équipe aux Jeux panaméricains de 2019. Sans oublier le moment fort de sa carrière, un laissez-passer pour les Jeux olympiques de 2021.
Combative, Gabriella Page poursuit en même temps ses études universitaires pour un jour devenir psychologue. Elle consacre de deux à trois heures par jour à des pratiques en escrime et une dizaine d’heures par semaine en musculation, force, agilité et vitesse. Des éléments essentiels pour se démarquer, mais encore faut-il que les blessures ne cessent de venir prolonger son parcours et miner sa confiance.
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Gabriella Page