Au Resto Pop, on s’active depuis des mois pour offrir un toit à ceux qui n’en ont plus. D’abord en les accueillant dans un centre d‘hébergement d’urgence, où l’on retrouve quatre lits et sept chaises de répits pour un dépannage.
Puis il y a le futur centre d’hébergement situé dans les locaux de La Maison François, un restaurant bien connu et qui a mis la clé dans la porte en 2023. L’espace convenant bien à la mission d’un centre d’hébergement, la Ville de Sainte-Thérèse a accepté de modifier le règlement de zonage afin d’y permettre son aménagement.
Un centre d’hébergement bientôt
Les travaux sont en cours et si tout va bien, l’endroit pourrait ouvrir ses portes d’ici deux mois. On y retrouvera une équipe de 15 à 18 intervenants et l’endroit disposera de cinq lits d’urgence pour un dépannage sans condition ainsi que de quatre lits de transition au 2e étage et dont le séjour de 0 à 90 jours impose ses conditions.
« C’est sûr que les gens doivent être en démarche et être prêts à se mobiliser. Ils doivent avoir le vouloir de sortir de la rue, vouloir rester actif, avoir un plan d’intervention, des rencontres supervisées par un intervenant et un niveau d’autonomie suffisant à maintenir un logement assez fonctionnel », explique le coordonnateur des Luc Lachapelle.
En fait, ce deuxième étage réservé à un séjour de moyenne durée fonctionnera comme un logement en colocation avec quatre chambres individuelles et une cuisinette commune, aussi l’autonomie et le respect interpersonnel figurent sur la liste des conditions. Et une équipe d’intervenants supervisera le logement 24H/7.
Après ce séjour, on les aidera à trouver un logement permanent. En collaboration avec d’autres organismes, l’équipe de travailleurs sociaux offre déjà ce service d’accompagnement à plusieurs personnes sans toit et qui demandent de l’aide et qui n’ont parfois pas le choix d’accepter de déménager dans un autre lieu de vie.
« C’est sûr que malheureusement, étant donné à cause de la crise du logement, on est obligé d’élargir un peu le territoire. La crise du logement, c’est partout, sauf qu’il y a quand même des endroits où c’est plus facile d’avoir accès à des logements. Dans le fond, plus on élargit les rayons, plus on a de chances de trouver un logement », spécifient Nythia Cloutier et Luc Lachapelle.
Itinérance ou précarité ?
Le visage de l’itinérance change, aussi le terme utilisé pour décrire ce phénomène semble de plus en plus inapproprié. Si antérieurement la dépendance à l’alcool, aux drogues, au jeu, et les problèmes de santé mentale expliquaient en grande partie l’itinérance, force est de constater que les raisons qui mènent à la rue s’élargissent.
« On reçoit de plus en plus de familles, ce qu’on voyait moins auparavant où la majorité de notre clientèle était, soit des hommes, soit des femmes seules. On reçoit beaucoup de familles ou tout simplement des gens qui n’ont jamais vécu d’épisodes d’itinérance, mais qui tombent dans la rue du jour au lendemain », observent les deux intervenants.
« Il y a des maisons qui existent pour des femmes en difficulté. C’est plate mais parfois, ce qui va se passer, c’est que la femme va aller avec ses enfants dans une ressource de femmes en difficulté et l’homme va se retrouver soit dans sa voiture, soit dans un centre d’hébergement, parce qu’il n’y a pas de centres d’hébergement accueillant les couples ou les familles. C’est comme ça qu’ils vont un peu s’en sortir. Ces organismes-là sont obligés d’assouplir leur mission première pour essayer d’accueillir ces femmes-là avec enfants qui sont dans la rue », relate Luc Lachapelle.
Hausse des interventions
Du côté du Resto Pop, l’équipe a constaté une hausse de plus de 40 % de leurs services : repas, accompagnement de recherche de logement ou en intervention psychosociale. Juste pour l’année 2023-2024, on a enregistré 3590 repas servis gratuitement comparativement à 2521 au cours de l’année précédente, soit une hausse de 42 %, sans parler des repas servis à la halte-chaleur, se chiffrant à 1703 en 2022-2023 puis à 3383 en 2023-2024.
Il faut savoir que l’accompagnement touche à un paquet de démarches de première nécessité: l’assistance au Tribunal administratif du logement, renouvellement de la carte d’assurance-maladie, réclamation du certificat de naissance, rencontres de médiation avec un locateur et même d’aller chercher des meubles.
Le Resto Pop dispose aussi d’un plateau de subventions permettant d’offrir quelques emplois dans sa cuisine, des programmes de six mois qui donne ensuite accès à un certificat reconnu par le ministère comme aide-cuisinier. « Ça peut les aider pour la suite de leur réinsertion sociale », note Luc Lachapelle.
On propose aussi des journées de travail en échange de repas. Du troc, en quelque sorte. Ou plutôt ce qu’on appelle l’empowerment, la reprise du pouvoir sur sa vie.
« La mise en action, c’est ce qui leur permet aussi de réajuster leur budget en fonction de leurs besoins. Plus ils font d’actions sociales en rendant des services de mise en action, plus ils ont des repas gratuits ici, ce qui leur permet de garder le peu de sous qu’ils ont pour faire autre chose. Puis, ils sentent qu’ils ont fait quelque chose d’utile dans leur journée. Ça leur donne confiance en eux », souligne le coordonnateur du Resto Pop.
Mais les deux intervenants insistent sur la fatigue physique inhérente à l’expérience de la rue. Lutter contre le froid use le corps, ce qui impacte l’endurance au travail. Rien que de se réchauffer exige un maximum d’énergie, ce qui laisse un individu dans un état de survie. Et cet aspect méconnu est peut-être le préjugé le plus courant entourant les personnes en situation de grande précarité.
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